Image de couverture : © Jack Moreh

“Il est presque règle générale que partout où il y a des mœurs douces, il y a du commerce ; et que partout où il y a du commerce il y a des mœurs douces” écrivait Montesquieu.

Il est clair que le commerce international a fortement aidé au développement de l’économie mondiale et a complètement changé notre société de production et de consommation. En effet, entre 1950 et 2010, le PIB mondial a été multiplié par 8,69 et les échanges de produits manufacturés ont été multipliés par 65.

Cependant, le commerce international ne présente-t-il que des avantages ? Autrement dit : quels en sont les inconvénients ?

Pour répondre à cette interrogation, nous détaillerons dans une première partie ce qu’est le commerce international ainsi que son fonctionnement tout en explicitant les divers avantages d’un tel système de commerce basé sur le libre-échange. Nous verrons ensuite les inconvénients liés au commerce international et comment ils peuvent être corrigés à l’aide de mesures protectionnistes.


L’objectif du commerce international est de réaliser des gains à l’échange. C’est en partant de ce constat que nous allons tenter de comprendre par quels mécanismes il y parvient.

En fonction de leur dotation factorielle, c’est-à-dire leur possession de capitaux, les pays vont choisir dans quelles branches ils vont se spécialiser. Smith expose sa théorie des avantages absolus qui consiste en la spécialisation d’un pays dans les secteurs dans lesquels il est le plus performant par rapport à ses concurrents. David Ricardo quant-à-lui parle d’avantages comparatifs, c’est-à-dire la spécialisation d’un pays dans les secteurs où il est le moins mauvais comparé aux autres.

Par exemple, le Japon possède un très fort capital humain suite à un investissement massif dans les structures d’apprentissage, c’est pourquoi ils sont plus aptes à développer de hautes technologies (ex : hi-fi Sony, un des pays déposant le plus grand nombre de brevets à l’année). Au contraire, le Brésil serait plus apte à se servir de ses ressources naturelles, de par l’étendue de son territoire et de sa fertilité. De la même manière, le faible coût de la main d’œuvre en Pologne par rapport à ses voisins européens présente pour eux un avantage comparatif. Cette spécialisation permet un rendement d’échelles et par conséquent une baisse des prix qui entraine une hausse de la demande et qui crée de la croissance économique.


Une fois le pays spécialisé, les firmes transnationales (implantées dans multiples pays) doivent faire face à des stratégies de localisation. En effet, pour augmenter la vitesse de production tout en diminuant les coûts il peut être judicieux pour une FMN de se délocaliser (destruction de l’usine d’origine dans le but d’en construire une autre dans un différent pays), s’implanter dans d’autres pays (création d’investissement directs à l’étranger) ou d’externaliser sa production (vente de licence par exemple). Ces choix peuvent varier en fonction de si la production est sur un plan de compétitivité-prix ou bien hors-prix.

Un exemple flagrant pourrait être les produit “premier prix” dont la stratégie marketing se base sur un principe de compétitivité prix tandis que des produits plus coûteux qui jouent sur leur image de marque tel que les produits “bio” se basent sur un principe de compétitivité hors-prix. Les stratégies de localisation des FMN varient aussi selon de nombreux autres critères tels que les coûts de fabrication, les barrières tarifaires et la fiscalité. Globalement, le fait qu’une entreprise se délocalise, s’externalise ou s’implante dans d’autres pays est positif puisque cela crée une compétitivité soutenue qui entraine une hausse des innovations, de la consommation et de la croissance économique mondiale ainsi qu’une hausse du pouvoir d’achat et un plus vaste choix de produits.


Le commerce international, c’est avant tout des flux de biens et services et des flux monétaires. Ces flux avaient originellement lieu sur un axe Nord-Sud, c’est ce qu’on appelle l’ancienne DIT. Les pays du Nord s’occupaient de la conception et la production et importaient les ressources du Sud. De nos jours, les échanges se font majoritairement sur des axes Nord-Nord et Nord-émergents. Cette nouvelle division internationale du travail met à part les pays du Sud les moins développés. La conception se fait toujours dans les pays du Nord mais l’assemblage tend à se faire dans les pays émergents. Les échanges sont cependant très soutenus sur l’axe Nord créé par les pays de la Triade.

Par exemple, la conception d’un smartphone se fera dans des pays développés du Nord et tirera des matières premières notamment à l’Afrique tels que les minerais rares pour les composants et le produit sera assemblé dans des pays émergents tels que la Chine (ex : Apple qui fait externaliser sa production en Chine en sous-traitant l’entreprise Foxcon).

Le commerce international est présent sous différentes formes. Le commerce dit “classique” comme défini par Ricardo et le théorème de HOS qui consiste en des échanges effectués en fonction des avantages comparatifs. Il existe aussi un commerce intra-branche, c’est-à-dire entre entreprises d’une même branche, par exemple BMW-Toyota. Ainsi qu’un commerce intra-firme, c’est-à-dire au sein d’une FMN, par exemple avec Boeing qui fait importer des pièces de nombreux pays. Chaque pays étant spécialisé dans la production d’une pièce, Boeing se retrouve avec des pièces de meilleure qualité et a un coût plus faible que s’il les avait lui-même produites. Ainsi, le commerce international réalise des gains à l’échange tout en renforçant l’interdépendance entre les pays.


Nous avons vu que le commerce international et le libre-échange présentait des avantages. Or tout avantage implique des inconvénients. L’affaiblissement voire la destruction de certaines branches au profit d’autres est un des risques majeurs du commerce international. Du fait de son grand territoire exploitable et de son investissement dans l’agriculture de masse, l’Amérique du Nord dispose d’une production agricole largement excédentaire (11,1 % d’exportations contre 6,9 % d’importations). Cela ne touche pas l’Europe qui est autosuffisante (exportations et importations de produits agricoles quasiment égales) mais rend dépendant l’Afrique et l’Asie de l’Amérique du Nord.

De plus, l’Afrique et l’Asie n’étant pas assez compétitifs dans cette branche seront contraints de se spécialiser ailleurs, les combustibles et les produits des industries extractives pour l’Afrique (62,9 % des exportations) et les produits manufacturés pour la Chine (80 % des exportations). La disparition de certaines branches stratégiques peut cependant être évitée à l’aide du protectionnisme éducateur qui protège temporairement des branches en mettant en place des taxes douanières notamment.


Le fait que des FTN choisissent de délocaliser leur production dans d’autres pays crée une destruction d’emplois dans le pays d’origine (principe de destruction créatrice de Schumpeter). Ainsi, les industries manufacturières telles que celle du textile connaissent une perte énorme d’emplois en France. Le poids de l’industrie manufacturière dans l’emploi intérieur total a été environ divisé par 2 en France en 1949 (environ 22 %) et 2015 (environ 10 %). Cela peut s’expliquer du fait que la main d’œuvre est moins chère dans les pays dit “ateliers” tels que la Chine.

Par conséquent, les entreprises françaises issues des branches manufacturières ont tendance à être délocalisées. Ainsi, il est plus difficile de trouver un emploi nécessitant une main d’œuvre peu qualifiée en France. La destruction d’emplois locaux peut aussi être atténuée avec des mesures protectionnistes qui aideraient à la sauvegarde de certaines industries.


Un troisième inconvénient du commerce international est le dumping social et fiscal. Pour avoir un IDH et un PIB/hab aussi élevé, l’Islande a mis en place un important système de dumping fiscal pour encourager les entreprises à s’installer dans leur pays. En baissant les impôts sur les entreprises et certaines taxes, l’Islande acquiert une concentration d’entreprises offrant des emplois bien rémunérés pour leur population. De la même manière, la Chine a fait preuve d’un dumping social en offrant une main d’œuvre à moindre coût dans le but d’améliorer sa productivité et ses exportations de produits manufacturés (93 % des exportations totales). Ces deux phénomènes font partie des dérives de la mondialisation et ne peuvent que difficilement être contrées.


Nous avons vu que le commerce international présentait de nombreux avantages (gains à l’échange, croissance économique, gain de pouvoir d’achat et plus grand choix de produits…) ainsi que de nombreux inconvénients (destruction de certaines branches qui entraine des destructions d’emplois, des pratiques mettant en péril certains secteur avec le dumping social ou fiscal…).

Bien que le commerce international soit généralement bénéfique pour le développement de la croissance économique, il ne présente pas que des avantages.

Adam Smith a écrit : “Le marchand n’est nécessairement citoyen d’aucun pays”. Cependant, on pourrait se demander dans quelle mesure il est possible que certains pays parviennent à mieux tirer profit du commerce international que d’autres.

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